I. Analyse historique du Liban.
Le 1er septembre 1920, le Général Gouraud, représentant de l’autorité mandataire française sur la Syrie, proclame l’Etat du Grand Liban comme entité autonome, détachée de la Syrie et dotée de frontières.
Géopolitiquement, ce pays a été au cœur de nombreux conflits impliquant les Etats du Proche-Orient que sont l’Egypte, la Syrie, Israël, l’Iran et l’Arabie Saoudite. De 1975 à 1990, le pays est secoué par une guerre civile meurtrière aux causes à la fois nationales et régionales. Ses répercussions se font encore sentir aujourd’hui avec une reconstruction difficile et des reprises ponctuelles de violences. En juillet 2006, en marge du conflit israélo-palestinien dans la bande de Gaza, et dans la continuité de leurs relations conflictuelles, une guerre éclate entre Israël et le Hezbollah. Toutes ces tensions sont ravivées en 2011 avec le conflit syrien.
A la suite de la Guerre civile, le Liban s’engage dans une spirale d’endettement pour se reconstruire en capitalisant sur le tourisme et les investissements étrangers provenant notamment des pays du Golfe. Néanmoins, ces pays, considérés comme zones de conflit, sont très sensibles aux conjonctures politiques et sécuritaires. Cette dépendance crée donc une situation de déséquilibres pour le Liban.
Le pays est également caractérisé par un gouvernement instable, marqué par une absence de réformes et une négligence des services publics. Politiquement, la situation est instable et dangereuse. Les années 2000, sont caractérisées par une campagne d’assassinats ciblés. En 2005, l’ancien Premier ministre Rafic Hariri est assassiné. Deux camps s’opposent alors : l’un anti-Syrie et l’autre pro-Damas emmené par le Hezbollah chiite. Cette périod est marquée par de nombreuses assassinats et une paralysie institutionnelle empêchant le pays de se développer.
II. Etat des lieux de la situation actuelle.
Vendredi 3 juillet, Ali Al-Haq, libanais de 61 ans, se suicide dans les rues de Beyrouth à cause de la situation économique et financière. Il n’est pas le seul, plusieurs choisissent cette option.
Le Liban vit actuellement la pire crise économique de son histoire, aggravée par la pandémie mondiale de covid-19 et un context politique tendu exacerbé par les tensions entre le Hezbollah et les Etats-Unis.
La vie économique est marquée par une dépossession du pouvoir d’achat, de nombreux licenciements et faillites, et une activité économique au ralenti. Au niveau monétaire, s’ajoutent à cela des taux d’intérêts élevés, une baisse des réserves de la Banque centrale et donc plus aucune garantie de la stabilité monétaire. La livre libanaise a connu une forte dépréciation et a atteint son plus bas historique en avril avec 4.000 livres pour un dollar. La dette publique s’élève désormais à 170% du PIB.
Le pays est aujourd’hui en perdition avec une paupérisation de la population. Parmi les plus fragiles se trouvent 1,7 million de réfugiés, en majorité syriens, et 250 000 travailleurs immigrés, qui sans emploi et sans abri.
La politique ne semble guère pouvoir apporter de solutions. En effet, le gouvernement d’Hassan Diab est officiellement composé de technocrates, avec l’absence de réformes de fond susceptibles de débloquer une aide internationale.
III. Dès lors, quelles solutions envisager ?
Tout d’abord, le Liban compte sur une aide internationale, espérant plus de 20 milliards de dollars d’aides étrangers. Néanmoins, le pays ne fait partie d’aucune organisation internationale et ne semble pas jouir d’une position privilégiée dans les relations internationales. Dominique Eddé écrit : “ Le Liban n’a plus beaucoup d’amis et il n’a même plus d’ennemis. Il suscite l’indifférence, ce qui est le plus terrible”.
Au niveau national, un plan quinquennal a été adopté fin avril et a pour objectif de réduire le déficit public et revoir la balance des paiements. Néanmoins, il implique pour ce faire une hausse des impôts et un gel de l’emploi dans le secteur public. Ces décisions ne vont faire qu’exacerber la crise sociale que traverse actuellement le Liban. L’analyse Nasser Yassin déclare que “L’objectif est de résoudre une crise épineuse, à travers des outils financiers pour obtenir un soutien extérieur à travers le FMI” (…) Les pauvres et la classe moyenne vont payer le prix, avec une inflation élevée et une contraction de l’économie attendues”.
Le gouvernement prévoit également un flottement du taux de change en adoptant un taux estimé à 3.500 livres pour un dollar. Est-ce réellement une bonne idée dans cette situation bien précise ? Entre autre, l’adoption d’un régime de change flottant le conduirait à s’engager davantage dans des politiques expansionnistes qui provoqueraient une forte inflation. De plus, il faudrait, avant de passer à un autre régime de change, réduire le déficit budgétaire, rembourser une partie de la dette publique et revenir à la croissance.
Inévitablement et au-delà de toutes mesures économiques et monétaires, une réelle volonté de changement est nécessaire. Le peuple libanais s’est exprimé, a dénoncé les injustices dont il était victime et la situation douloureuse dans laquelle il se trouvait. Mais comment conduire
un quelconque changement avec un gouvernement si corrompu et une géopolitique des territoires voisins si compliquée ?